Par Maitres Lusiana Windu et Kiara Jinn
I Des Heroines Idéalisées
Quand on s’attarde à bien regarder qui sont ces femmes, on s’aperçoit qu’elles ne sont pas de simples potiches. Sans elles, l’histoire ne serait pas aussi riche. Comme toutes les femmes, elles apportent leur façon de voir les choses. Elles trouvent de nouvelles solutions, elles sont mères, épouses, rebelles, diplomates, guerriers, militaire, elles agissent sur leur entourage propre comme elles agissent dans leur société. Elles sont loin des ces femmes qui se contentent de jouer les dames patronnesses dans des œuvres caritatives. Elles sont loin de Pénélope qui attendit Ulysse pendant des années.
Elles sont loin de la reine Mathilde qui broda sur la tapisserie de Bayeux les exploits de son Conquérant de mari, en attendant que Guillaume rentre à la maison. On est loin aussi de ses héroïnes languissantes du 19eme siècle qui se morfondaient dans un ennui mortel entre mari qu’elles n’aimaient pas et amours coupables, se drapant dans autant de vertu que d’hypocrisie. Par-dessus les moulins ces femmes placides qui se pliaient aux codes sociaux. Aux oubliettes les mijaurées des années cinquante qui ne pouvaient être qu’épouses bafouées, secrétaires ou intrigantes qui étaient toujours découvertes et punies à la fin. Bye bye les midinettes et les starlettes donnant au cinéma l’image d’une femme belle et scandaleuse à s’en damner, mais qui n’avaient pour matière grise qu’un poids chiche et qui ne trouvaient d’espoir d’élévation dans la société qu’auprès d’un homme riche qui la faisait changer de vie. A l’exemple des femmes de la fin des années 70, et plus généralement de la fin du 20eme siècle, les femmes de SW sont bien présentes dans toutes les couches de la société. Elles font des « métiers d’hommes », deviennent femmes d’affaire à la tête d’entreprise de dimension galactique. Elles font de la politique, font voter des lois qui font avancer leur société. Elles prennent les armes, et montent au front. Elles deviennent des chefs d’état charismatiques et respectés. Elles dépassent complètement la lutte féministe toujours active sur Terre, pour montrer une image de la femme et de la société où la parité homme femme est devenue naturelle et non plus un effet de loi, où la place des femmes est avant tout une histoire de compétence et non plus de genre. Lorsque George Lucas projette pour la première fois le tout premier volet de sa saga, la femme terrienne a encore beaucoup à faire pour être reconnue à sa juste valeur. Son génie lui fait montrer avec Leia une femme certes en détresse (répondant à un code de la littérature d’aventure et de légende) mais qui prends très vite les choses en main et sort les hommes du pétrin où ils se sont fourrés. Rappelons-nous cette scène dans le couloir du quartier pénitentiaire de l’Etoile Noire, ou Luke, Han et Chewbacca, venus pour la sauver se retrouvent coincés n’ayant pas prévu de plan pour repartir. Leia, une fois sortie de sa cellule, redevient celle qu’elle est : une femme qui a l’habitude de commander et de s’affirmer dans n’importe quelle circonstance. George Lucas, et tous les auteurs qui ont été inspiré par la première trilogie, ont le plus naturellement du monde imaginé des femmes qui sont avant tout des individus, sans pour autant perdre de leur caractère bien spécifique donné par leur condition de femme.
Les situations dans lesquelles elles grandissent et évoluent les font mûrir très vite. Elles s’impliquent très tôt dans leur environnement : à l’âge où les jeunes filles terriennes en sont encore à l’adolescence et de la puberté, les femmes SW sont déjà des femmes adultes. Elles sont femmes dans leur esprit, dans les responsabilités et les risques qu’elles prennent, avec des visages de jeunes filles. Rappelons-nous cette réplique de Dark Sidious dans la Menace Fantôme : « La reine est jeune et naïve. » Jeune, c’est certain. On sait, en lisant le livre de Terry Brooks, que les monarques sur Naboo sont élus sur un critère de sagesse et de don de soi.
Très tôt, Padmé Naberrie commença sa carrière en militant dans un mouvement de jeunes destiné à promouvoir la justice. Elle en parle d’ailleurs avec sa sœur qui, elle, a suivi le chemin plus classique de la femme au foyer. Padmé évoque son devoir avec quelques regrets dans la voie. Tout comme Leia qui prendra un engagement politique plus tard, la jeune femme ne vit que pour la cause qu’elle défend, au mépris de toute autre face de sa vie personnelle. Accéder au rang de chef d’état lorsqu’on a à peine quinze ans est une situation qu’on rencontrait fréquemment dans les temps anciens de notre bonne vieille Terre, mais complètement irréaliste dans nos sociétés modernes. Il n’y a plus que dans l’imagination des auteurs de scénario ou de roman qu’on peut ainsi confier de telles responsabilités à un individu aussi jeune. On ne voit pas les héroïnes agir en adolescentes. On voit des jeunes femmes matures. Il y a déjà quelques siècles, dans nos sociétés, il n’y avait aucune place à l’adolescence. Les filles passaient de l’enfance à l’âge adulte sans aucune transition. Il en est encore ainsi dans certaines sociétés contemporaines, où la lutte pour la survie du groupe dépend aussi de la maturité de ses membres. Au-delà des références culturelles, on voit dans tout l’univers de SW que les jeunes doivent apprendre très vite à se défendre et à défendre leur groupe ethnique, culturel, social ou familiale. Les jeunes filles n’échappent pas à cette nécessité. La galaxie est toujours en danger, il y a toujours des causes à défendre, il y a toujours un combat à mener. Une autre caractéristique de l’Univers SW explique aussi le jeune âge de ses héroïnes. Les sociétés dans lesquelles elles évoluent sont parvenues à un niveau très élevé, tant au niveau scientifique, que technologique, culturel, philosophique. Tous les domaines sont concernés, et en premier celui de l’éducation et de l’enseignement scolaire. Prenons les exemples de Padmé et Leia. Padmé a donc grandi au sein de la société Naboo, et Leia fut élevée sur Alderaan. Ces deux sociétés sont les exemples d’une évolution philosophique où ce que nous considérons encore sur Terre comme des utopies (humanisme, pacifisme…) sont le quotidien du commun de leurs membres. Ces deux femmes ont donc baigné dès leur plus jeune âge dans des valeurs altruistes. Elles ont appris très tôt le sens du devoir envers leur société, et s’implique donc très jeunes dans des actions que nous ne commençons à concevoir (avant de nous impliquer) qu’à notre adolescence. Il ne faut pas oublier non plus que nous sommes dans un monde imaginaire, et donc quelque part, idéalisé par ses auteurs.
Et que dire des aventures de Jaïna Solo, de Qwi Xux ou bien de Bria Tharen. La première est la digne héritière de l’engagement de sa mère et de sa grand-mère. La seconde, une jeune omwattie kidnappée par l’Empire, met au point une des armes les plus redoutables : le Broyeur de Soleil. Et la troisième, le premier amour de Han Solo, deviendra l’un des piliers de l’Alliance Rebelle naissante, tombant au champ d’honneur juste avant que Luke, Han, Ben et Leia n’entrent en scène.
Imaginez vous, mesdemoiselles en pilote de chasse d’exception à l’âge de 16 ans. Imaginez vous planchant sur des équations d’un tel niveau que polytechniciens et autres génies de ce genre seraient rabaissés au rang d’élèves de maternelle. Et bien c’est ce que ces jeunes femmes font le plus naturellement du monde dans leur vie de tous les jours. Quel bonheur de ne plus avoir à user ses jeans sur les chaises du lycée à devoir écouter des profs beaucoup moins amusant que C3-PO. Ce que nos vies ne nous permettent pas de faire, elles le vivent, et bien plus encore. Rien ne les arrête. Elles peuvent tout faire. Elles en ont l’intelligence, et les moyens technologiques. Et même les méchants, ceux sans qui elles ne pourraient pas montrer l’étendue de leurs talents, ne sont pas assez malins pour les empêcher de sauver la galaxie. Elles mettent ainsi en exergue des valeurs telles que le courage, l’abnégation, la force morale, la sagesse. Les idéaux sont le propre de la jeunesse. Et la jeunesse de ces héroïnes renforce le caractère idéal de leur vie. Ces valeurs que nous mettons du temps à mettre en pratique dans nos vies, elles les font leur très tôt, presque dès le berceau en ce qui concerne Jaïna et ses condisciples de l’Académie Jedi de Yavin. Est ce à dire que les auteurs rêvent de voir toutes les jeunes filles terriennes s’investir d’avantage dans la vie de leurs communautés ? Possible… Mais en idéalisant ainsi ces jeunes filles, ils font plutôt preuve d’imagination, connaissant parfaitement leur public et répondant à ses attentes. A travers les aventures des Padmé, Jaïna et autre Tenel Ka, ils touchent les rêves de toutes les petites filles que nous sommes encore quelque part au fond de nous, nous faisant vivre par procuration des situations qui nous sortent de notre vie « ordinaire ». Par le biais de cette évasion, nous devenons ou redevenons des jeunes filles libres, sans les contraintes sociales ou parentales, agissant concrètement pour changer les choses qui vont mal, des jeunes filles que seuls nos rêves nous permettent d’être.
Toutes ces femmes nous font rêver. Pour nous, ménagères derrière nos fourneaux, employées de bureau derrière notre écran, étudiantes, ces femmes vivent une vie que nous souhaitons vivre ; celle qui hante nos rêves, celle qui nous ferait nous valoriser aux yeux de notre entourage et surtout des nôtres.
Femmes nous sommes, indiscutablement. C’est notre état. Comme il a été dit, nous vivons dans une société où les schémas sont établis. Nous évoluons dans un monde où les femmes doivent se battre pour obtenir une place ou une considération. Les femmes de Starwars, comme il a été dit ont lutté pour arriver à la place qui est la leur. Elles sont souvent brillantes politiciennes, comme la sénatrice Padmé Naberrie ou comme Leia Organa. Elles sont également des femmes accomplies comme cette même Leia qui concilie avec plus ou moins d’harmonie sa vie de femme, d’épouse, de mère et de femme politique. Elles sont reines, auréolées de gloire comme le fut Amidala Reine de Naboo ou encore, avec un peu moins de panache la reine Jamilia qui lui succéda. Elles affrontent mille dangers, porteuses de messages d’espoir. Elles luttent souvent pour un idéal de paix et d’amour. Même quand elles empruntent des chemins moins conventionnels suivant l’image populaire, elles reviennent à des sentiers plus en accord avec l’image d’Epinal de la femme.